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Transition Juste

A partir de septembre 2025

La transition juste constitue un enjeu social majeur en même temps qu’un enjeu interne pour les fondations et pour le secteur. Comment concevoir et mettre en œuvre une « philanthropie de transition juste » ?

Le 6e rapport du GIEC[1], publié en mars 2023, met en exergue les effets dévastateurs des dérèglements climatiques pour la planète et les humains qui y habitent. Il insiste aussi sur la nature anthropique de ces dérèglements : ce sont nos sociétés, et leur manière de fonctionner, qui les ont produits et qui ont participé à causer ces dommages. Elles doivent évoluer pour permettre de construire une société plus résiliente pour faire face à la crise climatique. Selon le GIEC, il s’agit de penser non seulement au bien-être de la terre (« planetary health ») mais aussi au bien-être humain (« human well-being ») en prenant en compte la justice climatique, la justice sociale, l’inclusion et la transition juste.

La mise en œuvre de cette transition juste pose de nombreux défis dans la mesure où les populations modestes subissent ce que l’on peut appeler une « injustice écologique globale »[2], qui renvoie à plusieurs dimensions. En effet, les populations modestes :

  • sont les plus susceptibles d’être impactées par le dérèglement climatique et la perte de biodiversité et ont moins de ressources pour faire face à un dérèglement auquel elles ont pourtant moins contribué que les autres groupes sociaux (Althor, Watson & Fuller, 2016 ; Chancel, 2021 ; Chancel & Piketty, 2021) ;
  • sont plus exposées aux risques sociaux de la transition elle-même, du fait de la structure de leur budget, plus émetteur en carbone par euro dépensé, ce qui conduit la transition à être régressive socialement si elle n’est pas inscrite dans un contrat social impliquant.

Sur chacune de ces dimensions (exposition, émission, conception et mise en œuvre de la transition, participation), la philanthropie peut agir. Considérant son rôle d’actrice de l’intérêt général, il convient de se demander quel rôle la philanthropie peut jouer dans la transition juste. Comment passer d’une conception de l’environnement comme cause à défendre (philanthropie climatique ou environnementale) à une perspective de transition juste[3] ? Recherche, plaidoyer, agrégation d’actions associatives disséminées, interaction avec les instances de coordination publiques, éducation et sensibilisation, divesting, impact investing, la palette des registres d’action possibles est très large. L’enjeu n’est rien moins que d’orienter la société dans le sens de la prise en compte conjointe et systémique des limites planétaires et des besoins humains fondamentaux, tout en structurant une délibération démocratique, participative et intersectionnelle sur la gestion de ces ressources et la réponse à ces besoins.

Au-delà de l’enjeu social, la transition constitue un enjeu interne pour le secteur philanthropique Il s’agit de s’interroger sur la manière dont secteur peut non seulement participer à transformer la société mais aussi changer ses propres pratiques pour développer une « philanthropie de transition juste »[4]

Partant de ces constats et analyses, de la centralité de la question de la transition juste pour l’avenir de nos sociétés et du rôle éminent de la philanthropie dans sa conception comme dans sa mise en œuvre, le Centre en philanthropie de l’Université de Genève entend structurer un nouvel axe de recherche à l’échelle européenne sur cette question, articulant démocratie, philanthropie et transition juste.

Cherchant à déployer une perspective systémique, le projet se structurera autour de trois axes, du niveau organisationnel au niveau sectoriel, en passant par le cadrage du « narratif », pour faciliter un plaidoyer qui articule les enjeux dans le débat public :

  • Comment les fondations peuvent-elles répondre, dans leurs pratiques et stratégies, par leurs investissements comme par leurs financements de projets, aux enjeux de transition juste ? 
  • Comment les fondations peuvent-elles contribuer à structurer un champ cohérent en coordonnant les initiatives et les acteurs d’une grande diversité et parfois dispersés, jouer un rôle d’intermédiateur et de catalyseur (sur une question qui appelle perspective systémique et articulation des différentes échelles (des initiatives locales aux décisions à l’échelle nationale, européenne et globale) ?
  • Comment le secteur peut-il, grâce à sa capacité d’expérimentation, sa flexibilité et son indépendance, élaborer un narratif mais aussi une stratégie liant transition environnementale et justice sociale, dans un contexte de remise en question de ces deux dimensions à l’échelle européenne et internationale ?

[1] Intergovernmental Panel on Climate Change, (2023), « Climate Change 2023, Synthesis Report - Summary for Policymakers » - https://www.ipcc.ch/report/ar6/syr/downloads/report/IPCC_AR6_SYR_SPM.pdf

 

[2] Nicolas Duvoux, Michèle Lelièvre, Maël Ginsburger, Faire de la transition un levier de l’inclusion sociale. L’impact social de l’écologie, Conseil National des Politiques de Lutte contre la Pauvreté et l’Exclusion, Rapport au Premier ministre, 2024.

 

[3] Anne Monier, Anne Cornilleau, Kristy Romain, La philanthropie face aux défis environnementaux : Enjeux et perspective pour une transition juste, Étude de l’Observatoire Philanthropie et Société de la Fondation de France, 2024

 

[4] Morena, E. (2021) Beyond 2% : From Climate Philanthropy to Climate Justice Philanthropy, Edge Alliance / UNRISD.

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