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Bourses, travaux et créations


Avant d’être donnée à l’Université de Genève en juin 2021, la collection « Michel Froidevaux » a inspiré les travaux réalisés par des étudiant-es lors du workshop Weaving-Living, conçu par la professeure Natalia Solomatine assistée de Quentin Langlet, dans le cadre de la formation de première année du Département de Design Mode de la (Haute Ecole d’Art et Design).

Le Centre Maurice Chalumeau en sciences des sexualités présente ici quatre travaux réalisés lors du workshop, indépendant des activités du Centre, qui témoignent du potentiel créatif et discursif des documents issus de la collection « Michel Froidevaux » ayant désormais intégré le CMCSS et la Bibliothèque de l’Université de Genève.

Les 24 étudiant-es du workshop ont réalisé entre mars et juin 2021 des pièces vestimentaires inspirées de la collection d’ouvrages et d’objets de Michel Froidevaux, tout en utilisant la technique de la lirette enseignée par Danièle Mussard, compagne du collectionneur.

L’idée de ce projet est née à la suite d’une formation suivie par Natalia Solomatine à Lausanne à l’Ecole d’Arts Textiles « Filambule » de Danièle Mussard. Natalia Solomatine y apprend cette technique de tissage et découvre à cette même occasion la collection de Michel Froidevaux qui se trouve alors à l’étage supérieur. Le workshop Weaving-Living s’est construit à partir de ces deux univers.

« Mon projet « Oh, ma douce enfance » a pour sujet la naïveté enfantine et ce que le dessin d'enfant évoque : la spontanéité.

C'est à travers les différentes recherches dans la collection de Michel Froidevaux que j'ai pu rassembler une galerie de dessins qui se définissaient par une esthétique simple, comme faits "d'un trait de crayon". Ces dessins illustraient pour la plupart des scènes adultes et érotiques, mais grâce à la technique utilisée, on ne le ressentait pas sous cet angle-là.

C'est cet aspect qui m'a plu : la manière dont ces dessins érotiques me mettaient beaucoup moins mal à l'aise que d’autres images ou photos sur lesquelles j'ai pu tomber.

Cet aspect naïf et humoristique à propos de choses sérieuses m'a fait faire un lien avec l'enfance. »

Hannah Bordier, janvier 2022

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Crédits
Design : Hannah Bordier
Photo : Ulysse Lozano

« Everybody want to be... est un look inspiré en premier lieu des standards de beauté que l’on retrouve dans les sex-dolls 3D et autres personnages virtuels. À travers ma création, j’ai voulu prendre à contre-pied la digitalisation de l’enveloppe humaine. Cette digitalisation met en avant des corps d’une beauté standardisée, avec des peaux lisses et des silhouettes correspondant à des normes de beauté « utopiques ».

J’ai voulu casser ces codes en réalisant un tissage couleur chair. J’ai souhaité aussi questionner la sexualisation à travers le virtuel. Est-ce que cette virtualité pourrait amener à une nouvelle sexualité ? Des personnes qui ne sont plus attirées par l’humain mais par la 3D ?

Je me suis inspiré en deuxième lieu d’Asclépios, Dieu de la médecine, qui guérissait les parties du corps blessées ou atteintes de maladies. Les mortels allaient ensuite dans le temple du Dieu pour y déposer les parties guéries de leurs corps en offrande. Aujourd’hui peut-on dire que nous offrons nos corps à internet ? La modification via les filtres corrigeant nos imperfections et les retouches de nos images se trouvent à portée de nos mains, est-ce là ce nouveau Dieu Guérisseur ?

Imitant une peau complètement fripée et non unie, la matière ressemble à un tissu fabriqué avec des peaux de teintes différentes, comme si des humains avaient offerts leur chair pour créer ces vêtements. Le look a été tissé sur des chaînes en fils d’aluminium, créant ainsi un tissu modulable pouvant prendre la forme de la personne se trouvant à l’intérieur, ou au contraire, recréer une nouvelle silhouette avec de nouvelles formes, tout comme les avatars virtuels. Nous les adaptons selon nos désirs et notre vision de la beauté. »

Alexander Dejanovski, décembre 2021

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Crédits
Design : Alexander Dejanovski
Photo : Membres du Jury, HEAD

« Durant la visite de la collection de Michel Froidevaux, mes recherches se sont articulées autour du BDSM, discipline qui englobe plusieurs pratiques sexuelles.

Dans sa bibliothèque d’ouvrages, je me suis inspirée des photographies de Nobuyoshi Araki et des illustrations d’Eric Stanton afin de choisir certains codes du BDSM et proposer une silhouette qui exprime ma vision de cet univers dense et complexe.

Cette recherche m’a permis d’étudier les liens entre les matières, objets ou formes utilisées dans la pratique BDSM, afin de mettre en lumière une sensibilité cachée derrière des rapports violents utilisant la douleur, l’humiliation ou la contrainte. »

Fiona Giazzi, janvier 2022

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Crédits
Design : Fiona Giazzi
Modèle : Saveria Giazzi
Photo : Nour Eliz

« Alter est le nom de mon dernier projet d’atelier en première année de bachelor dans le Département de Design Mode de la HEAD. Ce projet a pour but de retranscrire la manière dont le corps se cache et se dévoile aux yeux des autres.

Après la visite de l’atelier de tissage Filambule annexé à la collection de Michel Froidevaux, j’ai été frappé par ce mélange, voire étonné. J’ai finalement trouvé l’idée poétique et assez ouverte, c’est-à-dire qu’elle me proposait une large palette de possibilités. J’ai ainsi commencé à prendre en photo plusieurs images de livres qui m’intéressaient, et ce, de manière complètement instinctive. Ce sont majoritairement des images à caractères homoérotiques vers lesquelles je me suis dirigé. De cet ensemble, une image en particulier, m’a marquée. Elle a été le point de départ de mon concept.

Ce projet est alors devenu une évidence pour moi. En effet, je souhaite à travers cette création illustrer cette part personnelle qui est souvent cachée, inavouée ou non lorsque l’on est une personne homosexuelle. Des images d’hommes nus sont ainsi transférées sur la matière textile et tissées grâce à la technique de la lirette.

En prenant comme inspiration les jeux d’ombres et de lumières, je propose une tenue en trois parties : une combinaison semi-transparente noire près du corps sert de base sur laquelle vient se poser la lirette avec ses images tissées. Cette partie est construite de manière imprévue, c’est-à-dire qu’elle ne suit pas les principes d’un vêtement conventionnel. Pour finir, un grand manteau noir, représentant la masculinité, sur lequel des ouvertures ont été réalisées pour que les images des corps nus puissent être devinées à travers celui-ci, vient dissimuler les deux autres tenues.

Finalement, j’essaie de représenter cette part en nous qui peut correspondre à tout un chacun et qui finira toujours par se montrer. C’est un sujet personnel aussi, car au-delà d’une orientation sexuelle, j’oppose différentes méthodes de travail. »

JeanCharles Jesus Sousa, janvier 2022

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Crédits
Design : JeanCharles Jesus Sousa
Modèle : Dejan Denic