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TITRE : Il est temps de déconstruire Everett… 

CONFERENCIERE : Anne Reboul (L2C2, CNRS, Lyon)

 

En 2005, Dan Everett a publié, dans Current Anthropology, un papier qui a fait les gros titres des journaux de la presse quotidienne américaine. L'article décrivait la culture et la langue d'une population amazonienne, les Pirahãs, qui compte environ 450 individus, vivant dans des micro-communautés éparpillées le long des 400 km de la rivière Maici. Everett y expliquait, entre autres choses, qu'il y a des "manques" communs à la culture et à la langue pirahã: du côté de la culture, une technologie limitée (arc et flèches), pas de mythes de création et pas de rituels; du côté linguistique, en syntaxe, pas de mouvement (pas de passif), pas de récursion (pas de relatives, pas de génitifs enchâssés), pas de nombre grammatical (pluriel/singulier), et du côté sémantique, pas de quantificateurs, pas de termes cardinaux ou de termes de couleur. L'ensemble de ces restrictions pouvaient s'expliquer selon Everett par l'existence d'un principe culturel tacite, le Principe de l'immédiateté de l'expérience, selon lequel on ne peut parler que de ce dont on a une expérience immédiate. L'article a dû son succès au fait qu'il clamait qu'il n'y avait pas de récursion en pirahã et qu'Everett considérait (à tort) cette affirmation comme un argument contre la notion chomskyenne de Grammaire universelle. Une controverse académique s'en est suivie, qui n'a malheureusement pas eu le retentissement qu'elle aurait dû avoir. 

 

Depuis Everett a écrit deux livres grand public et a accumulé le nombre non négligeable de 2286 citations (Google scholar). Il est temps de se poser la question de savoir si ses affirmations sur le Pirahã ont un fondement quelconque et si, à supposer qu'elles en aient un, elles ont les conséquences qu'il affirme…