8 mai 2025 - Marco Cattaneo
Des chaires d’excellence pour défendre la science
La science et la recherche traversent une zone de turbulences, prises entre restrictions budgétaires et attaques contre la liberté académique. Les chaires d’excellence constituent l’une des réponses apportées par l’UNIGE. Entretien avec la rectrice Audrey Leuba.
«Le programme de chaires d’excellence, créées pour attirer les meilleurs talents dans des domaines stratégiques, est lancé à un moment particulièrement opportun puisque la science est menacée de toutes parts.», Audrey Leuba, rectrice de l'UNIGE. Image: N. Ackermann
Quelles sont les menaces qui pèsent aujourd’hui sur le monde de la recherche?
La science est soumise à une double pression: financière et politique. Sur le plan géopolitique, le climat est préoccupant. Aux États-Unis, certaines institutions et certains domaines de recherche sont ouvertement remis en question. Cette semaine à la Sorbonne, lors de la présentation de l’initiative «Choose Europe for Science», la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a dénoncé des tentatives de restriction de la liberté académique, un phénomène inquiétant qui pousse beaucoup de scientifiques à douter de leur avenir. Ce désengagement peut également nuire à la coopération internationale, notamment dans des domaines cruciaux comme la santé, la diversité ou la lutte contre le changement climatique.
Les chaires d’excellence de l’UNIGE
Attirer les meilleurs talents, répondre aux grands défis de notre époque et faire rayonner Genève comme pôle scientifique de référence: c’est l’ambition du nouveau programme de chaires d’excellence lancé par l’UNIGE. Avec un soutien financier substantiel – 10 millions de francs dès 2025 – accordé par la Fondation Hans Wilsdorf, ce projet permet de consolider les domaines clés de la recherche, tout en créant un environnement propice à l’innovation.
Conçues comme de véritables tremplins scientifiques, ces chaires visent à soutenir des axes de recherche d’excellence tout en permettant à l’Ծé de repenser ses priorités stratégiques face aux grands enjeux contemporains. La médecine, les neurosciences, la physique, les mathématiques, voire le domaine de la vie dans l’Univers forment les piliers de cette première phase, mais d’autres disciplines pourraient suivre, selon les opportunités.
Ces premières chaires concernent des domaines dans lesquels Genève dispose d’un potentiel scientifique reconnu. Elles couvrent aussi bien les sciences fondamentales que les sciences de la vie, avec des projets qui visent à mieux comprendre le fonctionnement du cerveau, à explorer les lois de la matière au niveau quantique, à décrypter les maladies infectieuses à l’échelle moléculaire, à repousser les frontières des mathématiques pures ou encore à essayer de comprendre les origines et la répartition de la vie dans l’Univers.
Chaque chaire bénéficie d’un cadre flexible, pensé pour favoriser des partenariats stratégiques, renforcer les équipes en place et stimuler d’autres sources de financement. L’objectif est de créer un effet de levier durable, permettant à ces postes de s’inscrire dans le temps et de structurer des pôles d’excellence pérennes.
En plus d’intensifier ses capacités internes, l’Ծé entend, à travers ce programme, contribuer pleinement au rayonnement scientifique de Genève, en lien avec son écosystème hospitalier, éducatif et économique. Il s’agit aussi de soutenir une réflexion de fond sur les priorités de recherche à moyen terme, dans un contexte mondial où les attentes envers la science sont plus fortes que jamais.