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Campus n°160

Pôle cité, une expertise pointue au service de la polyvalence

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Interface entre la formation théorique dispensée au sein de la FPSE et la pratique, Pôle Cité offre un large éventail de prestations destinées aux professionnels de la santé mentale et de l’éducation, mais aussi au grand public. ±Ê°ùé²õ±ð²Ô³Ù²¹³Ù¾±´Ç²Ô.

C’est un peu le couteau suisse de la Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation (FPSE). Créé en 2017, Pôle Cité occupe aujourd’hui l’ensemble du 5e étage d’Uni Pignon. Il emploie une trentaine de personnes qui partagent leur temps entre des consultations couvrant un très large spectre de troubles liés au comportement et/ou au fonctionnement cognitif, la formation de professionnels et professionnelles des domaines de la psychologie, de la logopédie et des sciences de l’éducation, des activités de conseil et d’expertise à destination des entreprises, des écoles, des organismes associatifs, d’institutions ou des services de l’administration publique. Sans oublier la gestion d’une ligne téléphonique de soutien psychologique. Explications avec sa coordinatrice, Claire Mayor, chargée de cours au sein de la FPSE.

Campus: Il y a 5 ans, Pôle Cité dispensait entre 500 et 800 consultations par an. Aujourd’hui, ce chiffre est passé à 3500. Comment expliquez-vous une telle augmentation?

Claire Mayor: Le fait que nous soyons parvenus à recevoir l’accréditation en tant qu’établissement spécialisé de santé par le Service du médecin cantonal en 2022 a marqué un tournant décisif. Grâce à ce statut, jusque-là réservé aux structures médicales et aux hôpitaux, nos consultations sont désormais prises en charge par l’assurance maladie et l’assurance invalidité sur présentation d’une ordonnance délivrée par un médecin. À cela s’ajoute une évolution législative intervenue la même année qui autorise les psychologues-psychothérapeutes à facturer leurs prestations à l’assurance maladie de base en dehors d’une structure médicale au sens strict du terme, comme c’était déjà le cas pour la neuropsychologie depuis 2017.

Dans quels domaines proposez-vous des consultations?

Nos consultations s’adressent à tout le monde: enfants, adolescents, adultes, personnes âgées, personnes avec une lésion cérébrale, personnes avec un handicap ou un trouble développemental. Les problématiques que nous traitons sont très variées. Elles touchent aux domaines de la cognition et/ou de la santé mentale, incluant les questions liées aux apprentissages scolaires, aux émotions, au comportement et aux relations sociales, au langage et à la communication, à la concentration ou encore aux troubles mnésiques ou visuo-spatiaux.

Qu’est-ce qui fait la spécificité de la prise en charge offerte par Pôle Cité?

Tout d’abord, les patient-es qui viennent chez nous ne se retrouvent pas dans un milieu hospitalier, entouré-es par des personnes en blouse blanche. Cela peut paraître anodin, mais c’est un aspect qui est très apprécié. Ensuite, comme nous sommes sollicités pour des situations complexes et parfois très particulières, nous prenons le temps de fabriquer du matériel sur mesure ou d’adapter certains éléments pour parvenir à évaluer la situation des patient-es de manière extensive et fine. Enfin, et c’est peut-être le point principal, on peut amener une expertise et une analyse intégrée des différentes problématiques du patient, ce qui est assez rare dans d’autres structures. Pôle Cité regroupe en effet des unités disposant d’une expertise pointue dans différents domaines. Cela nous permet de réaliser des évaluations transdisciplinaires ou pluridisciplinaires, ce qui est particulièrement utile dans des situations complexes qui allient des problèmes neurocognitifs, comportementaux et psycho-affectifs. Comme nous commençons à être assez largement reconnus pour ce type de cas, on nous envoie d’ailleurs de plus en plus souvent des patient-es dont la situation nécessite un regard multiple.

En termes quantitatifs, votre plus grosse équipe reste pourtant celle de la logopédie…

Oui, et c’est aussi la plus ancienne pour ce qui est des consultations cliniques. C’est un domaine d’activité très important où Genève se trouve en sous-effectif alors que la demande ne cesse de croître.

Pourquoi?

Même si leur prévalence reste stable, autour des 5%, il y a une meilleure détection des troubles tels que la dyslexie, la dyscalculie ou la dysorthographie chez les enfants et les adolescents, et donc davantage de consultations. Les mesures d’aménagement qui ont été mises en place au niveau scolaire font que les enseignants, les enseignantes et les parents sont aujourd’hui davantage sensibilisés à cette problématique. Par ailleurs, pour ce qui est des troubles du langage oral chez le très jeune enfant, on assiste à une augmentation des cas qui est, pour partie, en lien avec la question du temps passé devant un écran.

Pôle Cité est également actif dans le domaine de la formation. Comment cela se traduit-il dans les faits?
Nous sommes très impliqués dans la formation post-grade. Avant d’être aptes à exercer, les logopédistes, les psychothérapeutes ou les neuropsychologues doivent effectuer un cursus de spécialisation qui s’étend généralement sur plusieurs années. Nous accueillons donc un certain nombre de psychologues et de logopédistes qui effectuent leurs années de pratique sous notre encadrement. Le Pôle propose aussi des stages d’observation pour les étudiant-es de la FPSE qui suivent un cursus de master. Dans le domaine des sciences de l’éducation, nous avons par ailleurs, de longue date, des ateliers d’apprentissage qui permettent aux étudiant-es de se familiariser avec les stratégies propres à aider des personnes en situation de handicap intellectuel.

Qu’en est-il des formations dites «par interactions simulées»?

En psychologie, on souffre un peu du fait que nous avons de grandes volées d’étudiant-es. Il faut donc trouver des stratégies pour leur apprendre à faire les choses sans être forcément en face d’un vrai patient. Cela fait donc plusieurs années que la Faculté a développé une véritable expertise dans l’utilisation d’acteurs et d’actrices pour entraîner les étudiants et les étudiantes à mener des entretiens, des anamnèses, des évaluations avec des patients simulés. Cela permet d’offrir un entraînement à la pratique dans des conditions sécurisées, mais très réelles. Et le résultat est vraiment sidérant. Les personnes qui suivent ce type de programmes ont souvent de la peine à croire qu’elles ont affaire à des acteurs.

Vous proposez également votre expertise dans le cadre de mandats hors du champ académique. Selon quelles modalités?

L’idée est de faire profiter la Cité, au sens large du terme, de l’expertise dont nous disposons dans certaines disciplines au travers de consultations très spécialisées. Notre public cible se compose de particuliers qui connaissent des difficultés dans le domaine psychologique, neuropsychologique, logopédique, mais aussi d’institutions, d’organisations ou d’entreprises souhaitant bénéficier d’une expertise sur une problématique donnée. Cela va de l’éducation numérique aux politiques éducatives, en passant par la question de l’addiction aux écrans ou encore la formation des adultes. À titre d’exemple, la Ville de Vernier a fait appel à nous afin d’évaluer un programme appelé «Parle avec moi» qui était destiné à la détection précoce des troubles du langage chez l’enfant.

Pouvez-vous dire quelques mots de la « psyline » dont Pôle Cité assume également la responsabilité?

Il s’agit d’une ligne téléphonique d’écoute et de soutien psychologique qui a été mise en place durant la pandémie de Covid-19. À l’origine, elle était destinée uniquement aux collaborateurs et collaboratrices de l’±«²Ô¾±±¹±ð°ù²õ¾±³Ùé. Devant le succès rencontré, elle a été élargie à l’ensemble de la communauté académique en 2021 et elle est aujourd’hui également accessible aux étudiant-es de l’IHEID. C’est un service gratuit et anonyme qui est assuré par des personnes formées afin de répondre aux situations de détresse psychologique, et qui sont capables de déterminer le degré d’urgence de la prise en charge. Il nous est ainsi parfois arrivé de devoir appeler les secours lors de risque suicidaire important. En deuxième ligne, la psyline peut également s’appuyer sur des experts en psychologie d’urgence ou des psychothérapeutes confirmés, aptes à proposer une consultation très rapidement ou, si nécessaire, à réorienter les personnes selon leurs besoins.

Sur le plan financier, comment fonctionne Pôle Cité?

L’±«²Ô¾±±¹±ð°ù²õ¾±³Ùé met à disposition les locaux que nous occupons et nous pouvons nous appuyer en partie sur les services centraux de l’institution pour certaines tâches administratives. Nous disposons également d’une adjointe scientifique et d’un secrétariat qui sont financés par la Faculté. Pour le reste, Pôle Cité est entièrement autofinancé. Les revenus tirés des consultations sont versés dans un fonds commun qui permet d’assurer les salaires des cliniciens et  des personnes en formation que nous engageons. Nous essayons aussi de trouver d’autres sources de financement pour couvrir les salaires des personnes dont les activités ne génèrent pas de revenus, par exemple celles qui assurent la gestion de la psyline.